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Les réseaux sociaux : nouveau tremplin des femmes vers l’entrepreneuriat?

Tisser son réseau en ligne : coup d’œil sur la relève entrepreneuriale féminine

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Qu’il s’agisse de vente en ligne ou encore de services de consultation, de plus en plus de femmes se lancent en affaires et misent sur les réseaux sociaux pour promouvoir leur entreprise. L’immense succès d’entrepreneuses telles que la chanteuse et blogueuse québécoise Marilou ou encore Kylie Jenner, la benjamine du clan Kardashian aux États-Unis qui a bâti un empire cosmétique évalué à un milliard de dollars américains, a d’ailleurs démontré le potentiel de ces plateformes comme outils promotionnels. Les réseaux sociaux auraient-ils contribué à intéresser les femmes à l’entrepreneuriat? Décryptage.

« J’ai réussi grâce aux réseaux sociaux. Sans Facebook, ça n’aurait pas marché », affirme d’emblée Léa Bégin.

Âgée de 31 ans, cette artiste maquilleuse et entrepreneuse travaille à son compte depuis 8 ans. En 2016, elle a inauguré beautiesandco.com, un blogue dédié aux soins de beauté et de bien-être. Elle fait partie de ces nombreuses femmes qui ont décidé de se lancer en affaires et qui misent sur les réseaux sociaux pour faire fructifier leur entreprise.

À 23 ans seulement, Léa Bégin décide de quitter son emploi dans une grande entreprise de maquillage et devient travailleuse autonome afin d’avoir la liberté de choisir sa clientèle. Étant donné ses moyens financiers limités, la jeune femme décide d’utiliser les réseaux sociaux pour faire connaître ses services.

« J’ai créé un “buzz” en documentant tous mes contrats de maquillage. Avec Facebook j’ai fait en sorte que les gens reconnaissent mon travail. Effet boule de neige : on a commencé à me recommander et j’ai dû refuser des contrats », raconte Léa, qui prévoit ouvrir sa première boutique à Montréal dans quelques mois.

L’émancipation au bout du clavier

Si l’entrepreneuriat a longtemps été vu comme un moyen de se libérer des contraintes de la vie d’employé·e, les microentreprises en ligne sont aujourd’hui perçues par plusieurs femmes comme un outil d’avancement. Une étude de la Caisse de dépôt et placement du Québec démontre d’ailleurs que depuis 2009, les Québécoises font 4,2 fois plus de démarches pour créer ou reprendre une entreprise.

« Sur les réseaux sociaux, on a vu un gros boom de femmes qui souhaitaient s’émanciper et réfléchir, qui ne voulaient pas retourner en entreprise après un congé de maternité, par exemple, et qui étaient à la recherche d’une solution », explique Julie Rochon, formatrice en visibilité Web.

Fraîchement installée à Madrid, en Espagne, Sara Powell a elle aussi récemment créé un site de vente en ligne, thewellnessbish.com, dédié aux produits de bien-être. L’année dernière, cette ingénieure de 32 ans a décidé de quitter les États-Unis pour s’installer en Espagne et changer de vie. Se lancer en affaires représentait la meilleure façon de vivre son rêve européen.

« Sur les réseaux sociaux, on voit beaucoup de femmes qui réussissent en affaires. Cela rend l’entrepreneuriat beaucoup plus tangible. »

— Sara Powell, entrepreneuse

« Avoir une entreprise en ligne me permet d’avoir un style de vie plus flexible et de pouvoir voyager. Tant que j’ai accès à Internet, je peux travailler de n’importe où », explique-t-elle.

La jeune entrepreneuse sans expérience lors de la création de son entreprise n’a d’ailleurs pas hésité à se former en ligne, en regardant des tutoriels sur YouTube par exemple, et à aller chercher du soutien sur de nombreux sites Internet dédiés à l’entrepreneuriat féminin.

« Sur les réseaux sociaux, on voit beaucoup de femmes qui réussissent en affaires. Cela rend l’entrepreneuriat beaucoup plus tangible. Les nouvelles technologies et les réseaux sociaux rendent également la création d’entreprises beaucoup plus facile et abordable. On n’a plus besoin de savoir programmer pour créer son site Web », explique Sara Powell.

Marketing à petits coûts

De Facebook à Instagram en passant par Twitter et Pinterest, les médias sociaux semblent en effet être devenus les meilleurs alliés des entrepreneuses. Et pour cause, plusieurs y voient une manière économique de faire connaître leur entreprise et de court-circuiter les réseaux de publicité et de communication traditionnels.

Des statistiques récentes fournies par Instagram, qui compte un milliard d’utilisatrices et d’utilisateurs mensuellement, révèlent que plus de 200 millions de membres visitent le profil d’au moins une marque par jour et que 60 % des personnes sondées affirment découvrir de nouveaux produits sur Instagram. De plus, selon un sondage réalisé par la firme marketing américaine Influence Central, 86 % des femmes seraient plus enclines à faire un achat auprès d’une marque ou d’une compagnie après un passage sur leurs réseaux sociaux.

« La réduction des coûts, c’est un aspect important, mais les réseaux sociaux permettent aussi de tâter le pouls de sa clientèle rapidement. Pas besoin de faire de grands sondages. Ils permettent de réajuster le tir plus rapidement que la publicité et les médias traditionnels quand on fait des erreurs. »

— Camille Desrosiers-Gaudette, présidente de l’agence de communication Codmorse et fondatrice du blogue Le Cahier

Pour les femmes, qui ont souvent plus de difficulté à lever des fonds pour leur entreprise, les médias sociaux représentent donc une véritable opportunité. Selon une récente étude du Boston Consulting Group et de MassChallenge, un accélérateur de start-up américain, lorsque les entrepreneuses lancent une ronde de financement, elles reçoivent jusqu’à un million de dollars américains de moins que les hommes.

« La réduction des coûts, c’est un aspect important, mais les réseaux sociaux permettent aussi de tâter le pouls de sa clientèle rapidement. Pas besoin de faire de grands sondages. Ils permettent de réajuster le tir plus rapidement que la publicité et les médias traditionnels quand on fait des erreurs », explique Camille Desrosiers-Gaudette, présidente de l’agence de communication Codmorse et fondatrice du blogue Le Cahier.

« Les femmes ont une aversion aux risques et le marketing sur les réseaux sociaux permet d’enlever un certain niveau de stress parce qu’on a le droit à l’erreur. Le marketing est devenu plus accessible qu’il l’était il y a 15 ans », ajoute-t-elle.

Surmonter le syndrome de l’impostrice et briser l’isolement

À 32 ans, Camille Desrosiers-Gaudette est à la tête de son entreprise depuis déjà 10 ans. Pour la jeune entrepreneuse qui se spécialise en stratégie et marketing Web, les réseaux sociaux lui ont permis d’acquérir une légitimité.

« C’était difficile d’être une fille de 22 ans et d’être crédible auprès des banquiers et des gens d’affaires. Sur le Web, ma réputation s’est construite grâce à ce que j’écrivais, aux forums auxquels je participais. Je me suis fait énormément de contacts en ligne et ça m’a permis d’accélérer ma carrière », explique-t-elle.

Même son de cloche chez Julie Rochon, qui s’est lancée en affaires il y a trois ans. « J’avais le syndrome de l’imposteur. Je pensais ne pas avoir assez d’expérience. Les réseaux sociaux m’ont permis de juger mon niveau par rapport aux professionnel·le·s que je suivais en ligne, ce qui m’a aidée à déterminer ma valeur. »

« Les réseaux sociaux m’ont permis de juger mon niveau par rapport aux professionnel·le·s que je suivais en ligne, ce qui m’a aidée à déterminer ma valeur. »

— Julie Rochon, formatrice en visibilité Web

Julie Rochon affirme cependant que sa plus grande crainte avant de démarrer son entreprise était la solitude. Une appréhension qu’elle a pu surmonter grâce à de nombreux groupes de soutien en ligne pour entrepreneuses.

« Je travaille seule dans mon sous-sol. C’est difficile. Mais le Web m’a permis de me rapprocher d’autres femmes entrepreneuses. J’ai découvert tout un réseau de soutien. Je ne pouvais même pas m’imaginer que ça existait avant de me lancer à mon compte », raconte-t-elle.

Les femmes toujours moins nombreuses que les hommes

Malgré tout, les femmes se lancent toujours moins que les hommes en affaires. Selon la Corporation de développement économique communautaire (CDÉC) de Québec, les entrepreneuses représentent 36 % de l’ensemble des propriétaires d’entreprise, ce qui représente 5,3 % des femmes adultes contre 8,6 % chez les hommes.

« Dans mon entreprise, on reçoit énormément de petites entreprises gérées par des femmes qui veulent des conseils. Leur plus grande crainte c’est l’aspect financier. Elles se sentent responsables de leur famille, de leur avenir. Elles voient le stress financier et non l’occasion de faire de l’argent, tandis que les hommes, eux, font plus souvent fi de ce stress. Elles ont plus peur de perdre au change », explique Camille Desrosiers-Gaudette.

Dans un tel contexte, les réseaux représenteraient-ils un nouveau levier pour les entrepreneuses qui désirent briser le plafond de verre?