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Retraite, retreat, Ruhestand…

Comment font les pays qui parviennent à verser des prestations de retraite décentes?

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Puisque s’inspirer de ce qui se fait ailleurs peut fournir de bonnes idées, faisons un saut dans quelques pays pour découvrir comment l’État parvient à verser des prestations de retraite suffisantes sans étrangler le système de pensions publiques.

Trois. C’est le nombre d’approches qui peuvent assurer à une population un revenu de retraite minimal, d’après le rapport Panorama des pensions publié en 2011 par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Travailler plus longtemps

La première approche consiste à allonger la durée de la vie active. Le gouvernement Harper l’a récemment adoptée en faisant passer l’âge officiel de la retraite de 65 à 67 ans. La moitié des pays de l’OCDE ont déjà pris ce virage, ou entendent le faire dans les années à venir. En moyenne, dans les pays de l’OCDE, l’âge d’ouverture des droits à la retraite est de 63 ans pour les hommes et de 62 ans pour les femmes; il devrait passer à près de 65 ans pour les deux sexes d’ici 2050, selon les prévisions de l’Organisation.

La moitié des pays de l’OCDE ont déjà allongé la durée de la vie active, ou entendent le faire.

Ainsi, plusieurs des femmes qui peuvent actuellement prendre leur retraite plus tôt que les hommes (dans la moitié des pays de l’OCDE) devront travailler plus longtemps pour s’assurer une retraite décente. Par exemple, en République slovaque, l’âge de la retraite est en moyenne de 57 ans pour les femmes et de 62 ans pour les hommes; en Autriche, de 60 ans pour les femmes et de 65 ans pour les hommes; et au Japon, de 62 ans pour les femmes et de 64 ans pour les hommes. D’ici 2050, cet écart devrait être réduit à néant, d’après les prévisions des experts de l’Organisation.

« Il est surprenant que quelques pays seulement aient adopté la solution qui consiste à moduler l’âge de la retraite en fonction de l’espérance de vie. Cette stratégie a l’avantage d’adresser un signal clair quant à la nécessité de travailler plus longtemps. De plus, elle permet de maintenir les prestations annuelles à un niveau plus élevé que si l’âge d’ouverture des droits était maintenu malgré l’augmentation de l’espérance de vie », disent les deux éditorialistes du rapport de l’OCDE, John Martin, directeur, Direction de l’emploi, du travail et des affaires sociales, et Carolyn Ervin, directrice, Direction des affaires financières et des entreprises.

C’est ce qu’a aussi entrepris l’Allemagne, qui s’est dotée du plan Riester, un régime à points un peu complexe dans lequel les cotisations donnent droit, pour un salaire moyen, à un point par an. La retraite venue, les points cumulés sont additionnés et ajustés en fonction, entre autres, du nombre de retraités rapporté au nombre d’actifs.

Veiller sur les plus vulnérables

La deuxième approche revient à concentrer les efforts du régime public sur les plus vulnérables. Différentes manières de procéder existent. Par exemple, la Finlande, la France et la Suède ne répercutent maintenant qu’une fraction des baisses des prestations sur les bas salaires. Ces baisses affectent donc moins les pauvres que les bien nantis. L’idée est d’affaiblir le lien qui existe entre les cotisations individuelles et les prestations versées, afin que ceux qui ont peu cotisé durant leur vie active n’en soient pas trop pénalisés durant leurs vieux jours. De leur côté, l’Australie et le Royaume-Uni utilisent une partie des ressources budgétaires dégagées par le relèvement de l’âge de la retraite pour augmenter le niveau des prestations, en privilégiant les retraités les plus pauvres.

Concentrer les efforts du régime public sur les plus vulnérables permet d’assurer à une population un revenu de retraite minimal.

Une telle approche devrait se généraliser dans les années à venir, ce qui profitera surtout aux femmes. Car dans 27 des 30 pays de l’OCDE, les femmes âgées ont plus de risques d’être touchées par la pauvreté que les hommes âgés. En moyenne, le taux de pauvreté des 65 ans et plus est de 15 % pour les femmes et de 11 % pour les hommes (respectivement 8,1 % et 3,1 % au Canada). Il n’y a que trois exceptions à cette situation :  l’Islande, le Luxembourg et la Nouvelle-Zélande, pays dans lesquels le taux de pauvreté de l’ensemble des personnes âgées est faible.

Cinq autres pays s’en approchent — Belgique, Mexique, Pays-Bas, Portugal et Turquie — , avec un taux de pauvreté des femmes qui n’est que légèrement supérieur à celui des hommes. C’est en Irlande, en Finlande et en Norvège que l’écart entre hommes et femmes est le plus grand : le taux de pauvreté des femmes y est supérieur de plus de 10 points de pourcentage à celui des hommes. Les écarts sont également importants en Autriche, aux États-Unis, en Italie, au Japon et en République slovaque.

Encourager l’épargne individuelle

La troisième approche consiste à encourager les salariés à épargner pour leur retraite afin de compenser les réductions des prestations publiques en vue. En Nouvelle-Zélande, le programme KiwiSaver, qui affilie automatiquement les salariés à des dispositifs de retraite privés (à moins qu’ils n’en décident autrement), a vite accru la couverture des pensions privées. Le Royaume-Uni s’engagera dans cette voie en octobre. Et au Québec c’est ce que prévoyait aussi, partiellement, le Régime volontaire d’épargne-retraite (RVER). Par ailleurs, les pensions privées du plan Riester, en Allemagne, connaissent un franc succès, surtout auprès des jeunes et des travailleurs à bas salaire (même si ce plan mise davantage sur des incitations fiscales relativement généreuses que sur l’affiliation automatique).

Les salariés sont encouragés à épargner pour leur retraite afin de compenser les réductions des prestations publiques en vue.

« Le secteur public continuera de jouer un rôle très important pour assurer les revenus des personnes âgées, mais ce rôle diminuera. Inévitablement, il faudra travailler plus longtemps et cotiser à des dispositifs de retraite privés pour combler la différence, estiment M. Martin et Mme Ervin. À long terme, la mise en place d’un système de retraite diversifié — associant public et privé — représente non seulement la perspective la plus réaliste, mais aussi le choix le plus avisé. »