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Se protéger dans l’union de fait

Après combien d’années de vie commune sommes-nous considérés comme mariés? Ai-je droit à un certain partage des biens s’il y a rupture?

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Après combien d’années de vie commune sommes-nous considérés comme mariés? Ai-je droit à un certain partage des biens s’il y a rupture? Et les enfants? Du coté des conjoints de fait, les interrogations ne manquent pas. Voici quelques réponses et quelques conseils. Contrairement aux lois de certaines autres provinces, le Code civil du Québec est silencieux face au mode de vie qu’est l’union libre. Juridiquement parlant, cela signifie que les conjoints de fait n’ont ni droits, ni devoirs, ni obligations spécifiques l’un envers l’autre, peu importe le nombre d’années de vie commune. Bien entendu, lorsque l’amour, le respect et la bonne entente règnent dans le couple, on ne se soucie guère de la position du législateur face à ce que l’on vit. Pourtant, il importe de s’informer et de faire preuve de prévoyance afin qu’à la dissolution du couple tout se passe comme on le souhaite. Monique vient de mettre un terme à sa relation avec Benoît. Pendant toute la durée de leur cohabitation, elle n’a occupé aucun emploi rémunéré. Comme elle est maintenant sans ressource financière, elle espère pouvoir compter sur une pension alimentaire de Benoît. Faux espoir! La loi n’imposant aucune obligation alimentaire aux conjoints de fait Monique ne peut rien exiger de Benoît pour assurer sa subsistance. Jacqueline enseigne dans un cégep et Raymond est commerçant. Tout au long de leur vie commune, ils ont acquis, chacun de leur côté, des biens tels que l’automobile et les appareils électriques, à l’exception de la maison qui a été achetée en copropriété. A la rupture, aucun des ex-conjoints ne s’est donc retrouvé complètement démuni. La répartition des biens individuels s’est facilement réalisée puisque les preuves d’achat clairement identifiées avaient été conservées. A la vente de la maison, chaque copropriétaire a reçu la somme qui lui revenait (moitié-moitié ou selon la proportion stipulée au contrat d’achat).

Signature à deux

Lorsqu’on vit en union libre, tous les droits que l’on peut avoir sur une résidence, par exemple reviennent au conjoint propriétaire de cette maison. En d’autres termes, si vous n’êtes pas copropriétaire, votre partenaire peut à sa guise et sans votre permission vendre ou louer la résidence que vous partagez avec lui ou même vous en expulser. « Et la loi concernant le partage du patrimoine? », direz-vous. Elle ne s’applique qu’aux époux, pas aux conjoints de fait, tout comme la protection de la résidence familiale. Il est très important, pour les conjoints de fait qui le désirent, d’acquérir ensemble des biens immobiliers, qu’il s’agisse d’une résidence principale, d’un chalet ou d’un terrain. Cela implique évidemment que les deux conjoints signent les titres de propriété et assument les responsabilités qui en découlent.

Qu’arrive-t-il en cas de décès?

Certaines lois telles la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, la Loi su l’indemnisation des victimes d’actes criminels, la Loi visant à favoriser le civisme, de même que le Régime de rentes du Québec (RRQ) et le Régime d’assurance automobile accordent certaines indemnités si, au moment du décès, les conjoints de fait vivaient ensemble depuis au moins trois ans (ou depuis un an si un enfant est né ou naîtra de leur union) et s’ils étaient publiquement reconnus comme conjoints. Ainsi, le Régime de rentes verse une rente mensuelle à la conjointe survivante ou au conjoint survivant. Cependant, pour y avoir droit, il faut être âgé de 35 ans ou plus, sinon, avoir au moins un enfant à charge ou être invalide. En ce qui a trait à l’assurance automobile, une indemnité forfaitaire est versée à la conjointe survivante ou au conjoint survivant reconnu. Si le défunt versait une pension alimentaire à une ex-épouse, cette personne a aussi droit à une indemnité forfaitaire à titre de personnes à charge de la personne décédée. Vous habitez un logement? Il est tout aussi préférable que votre signature, de même que celle de votre partenaire, apparaisse sur le bail. C’est la meilleure façon de s’assurer de la prise des décisions à deux, ce qui entraînera évidemment le partage des responsabilités liées à la location du logement. Mais supposons que vous n’ayez pas signé le bail et que votre conjoint de fait soit le locataire du logement où vous vivez. S’il venait à partir avant la fin du contrat, vous pourriez continuer d’habiter le logement à condition de prouver que vous y vivez depuis au moins six mois. Vous devriez aussi, dans un délai de deux mois après le départ de votre conjoint, aviser le locateur de votre décision. Lorsque l’un des conjoints de fait décède, le survivant ou la survivante n’hérite pas à moins qu’il y ait un testament en sa faveur. Toutefois, il peut, dans certains cas, toucher une rente ou une indemnité. Qu’en est-il de l’assurance-vie? La survivante ou le survivant doit être nommément désigné comme bénéficiaire pour avoir droit à la prestation de décès.

Et les enfants dans tout cela?

Depuis avril 1981, quelles que soient les circonstances de leur naissance, tous les enfants (issus d’une union libre ou d’un mariage) sont égaux devant la loi. Dès lors que l’on peut clairement identifier qui sont leur père et leur mère, ils bénéficient tous des mêmes droits et des mêmes protections. Tout enfant peut donc raisonnablement s’attendre à être logé, nourri, habillé et éduqué. Cette obligation parentale subsiste malgré la rupture de l’union. Par conséquent, si vous vous séparez et obtenez la garde des enfants, vous pouvez exiger de votre ex-conjoint de fait une pension alimentaire afin d’assurer leur entretien et leur éducation. En cas de décès, si vous n’avez pas rédigé de testament, ou si vous n’avez désigné aucun bénéficiaire particulier sur la police d’assurance-vie, vos enfants, contrairement à votre conjoint de fait, deviennent automatiquement les héritiers légaux.

Les écrits restent

Pour les conjoints en union libre, il existe cependant plusieurs façons de mieux se protéger : outre le contrat de copropriété pour l’achat des biens importants, ils peuvent utiliser d’autres outils juridiques pour régler leur situation : un contrat de société pour l’exploitation d’un commerce, un testament dans lequel on peut léguer des biens à son conjoint ou encore, la conclusion d’un contrat d’union de fait appelé aussi contrat de vie commune. Ce dernier couvre toute la période de vie commune et peut s’appliquer en cas de rupture. Les conjoints peuvent y inclure, à quelques exceptions près, toutes les ententes qu’ils jugent appropriées : type de compensation offerte à celui ou à celle qui quitterait son emploi pour s’occuper des enfants, contribution de chacun aux charges du ménage, partage de biens en cas de rupture. Pour plusieurs personnes en union de fait, certains désagréments peuvent ainsi être évités.

Une prestation, une bourse, un prêt?

La Loi sur la sécurité du revenu reconnaît les conjoints de fait dès le début de la cohabitation s’ils ont un enfant commun; sinon, après un an de cohabitation. La Loi sur l’aide juridique, pour sa part, les reconnaît dès la cohabitation comme s’ils étaient des époux. Pour accorder l’accès aux services de l’aide juridique et pour fixer le montant de la prestation à verser, on tient compte du revenu des deux parties et non pas seulement de celui du bénéficiaire ou de la bénéficiaire. La reconnaissance des conjoints de fait intervient également dès la cohabitation dans le programme d’aide financière aux parents utilisateurs de services de garde. Dans la Loi sur l’aide financière aux étudiants, on ne reconnaît les conjoints de fait que s’ils cohabitent avec un enfant commun ou avec l’enfant de l’un ou l’autre parent. Dans ce cas, on ne tient pas compte du revenu de leurs parents respectifs pour fixer le montant des prêts et bourses, mais seulement de celui de l’un et de l’autre conjoint.