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Le nouveau modèle de fixation des pensions alimentaires pour enfants des avantages et des inconvénients

Depuis le 1er mai dernier, les pensions alimentaires pour enfants font l’objet d’un nouveau mode de calcul au Québec.

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Depuis le , les pensions alimentaires pour enfants font l’objet d’un nouveau mode de calcul au Québec. Cette procédure a été mise en place dans le but d’assurer aux enfants un soutien plus équitable de la part de leurs deux parents après une séparation ou un divorce.

En bref : qu’est-ce qui change?

Jusqu’à tout récemment, les tribunaux fixaient le montant de la pension alimentaire destinée aux enfants sans disposer de règles claires. Il pouvait donc en résulter des inégalités et des décisions totalement imprévisibles. Ce que devrait contrer le nouveau système, instauré pour uniformiser les modes de calcul et affirmer la responsabilité que conservent les deux parents envers leurs enfants après la rupture. Avec l’entrée en vigueur du modèle québécois de fixation des pensions alimentaires pour enfants, une mère et un père qui divorcent ou se séparent ont dorénavant l’obligation de remplir un formulaire servant notamment à faire état de leurs revenus respectifs. Par la suite, les différents renseignements compilés sont intégrés à une table de calcul qui, pour un niveau de revenu donné, indique une contribution alimentaire de base selon le nombre d’enfants. Cette somme est présumée couvrir globalement les dépenses rattachées à l’enfant visé par la pension. Peuvent s’ajouter à ce montant de base des frais additionnels (garderie, programme de formation, etc. ). Reste à déterminer la part de la contribution totale que chacun des ex-conjoints devra assumer. Celle-ci sera établie au prorata des revenus de chacun et du temps durant lequel l’un et l’autre ont la garde de l’enfant. Afin d’y voir plus clair, prenons le cas de deux ex-conjoints qui ont deux enfants à charge. La mère a un revenu brut de 19. 000 $ et le père, de 39. 000 $ (voir encadré). Ce système de fixation s’applique aux demandes de pension alimentaire pour enfants déposées depuis le . Pour que les demandes antérieures y soient assujetties, on doit faire expressément une demande de révision. Mais comment savoir si on gagnera au change avec ces nouveaux barèmes? Un conseil : s’informer, se faire conseiller, soupeser les conséquences avant de rouvrir les débats.
Calcul de la contribution alimentaire annuelle de base des deux parents
Informations Père Mère
Revenu brut de travail 39 000 $ 19 000 $
Déduction de base 9 000 $ 9 000 $
Revenu disponible 30 000 $ 10 000 $
  • Revenu disponible des deux parents : 40 000 $
  • Contribution alimentaire annuelle des deux parents selon la table : 7 380 $

Dans ce cas-ci, le père, dont le revenu disponible équivaut à 75 % du revenu des deux parents, devrait assurer dans la même proportion la contribution totale pour les enfants. Par conséquent, la part de la mère serait fixée à 25 %, soit le pourcentage de son revenu dans le revenu des parents.

  • 7 380 $ × 75 % = 5 535 $ = contribution alimentaire du père.
  • 7 380 $ × 25 % = 1 845 $ = contribution alimentaire de la mère.

Si la garde exclusive est confiée à la mère, le père lui versera donc 5 535 $, somme nécessaire pour atteindre la contribution totale fixée.

Si le père a la garde exclusive des deux enfants, la mère lui versera 1 845 $. Si la garde est partagée entre la mère et le père, le coût de la garde pour chaque parent s’obtient en effectuant l’opération suivante :

la contribution alimentaire annuelle × le pourcentage du temps de garde.

Ainsi, dans un cas où les deux parents se sont vu confier la garde à parts égales, le calcul se présentera comme suit :

7 380 $ × 50 % = 3 690 $

Le père devra donc verser à la mère ce qui excède sa part à elle, c’est-à-dire : 3 690 $ – 1 845 $ = 1 845 $

Différentes formules de garde sont prévues par le système, faisant varier le pourcentage pris en considération.

Quelques mises en garde

Une des grandes qualités du modèle de fixation est bien sûr d’introduire des normes en matière de pension alimentaire, des montants inscrits dans une table plutôt que l’inconnu et l’arbitraire. Toutefois, la comparaison entre la pension qu’on reçoit déjà et la somme qui serait versée selon le mode de fixation n’est pas si facile. D’abord, nous l’avons vu, le calcul tient compte du revenu disponible des deux parents. Or, la femme qui désire savoir quel serait le nouveau montant dont ses enfants pourraient bénéficier ne connaît pas toujours le revenu exact de son mari qui, de son côté, n’est tenu de le lui révéler qu’une fois la procédure engagée. Voilà une première mise en garde servie par Me Élisabeth Pinard qui pratique depuis plus de 15 ans en droit de la famille. Selon l’avocate, il ne faut pas négliger non plus le fait que, désormais, le pourcentage de temps de garde a une influence directe sur le montant de la pension alimentaire. La réouverture des discussions pourra donc éventuellement conduire un père à vouloir hausser sa part de garde pour réduire le montant de la pension qu’il verse à son ex-partenaire. Élisabeth Pinard entrevoit d’ailleurs ces discussions mathématiques avec une certaine appréhension… Un autre élément à considérer est la défiscalisation des pensions alimentaires. Elle touche automatiquement les nouvelles ordonnances, mais pourrait laisser un peu moins d’argent entre les mains des femmes qui obtiennent une pension pour leurs enfants. En effet, parce que la pension n’est plus déductible pour le payeur, il est à prévoir que les montants consentis seront dorénavant moins « généreux ». Toutefois, les femmes qui ont un revenu plus important pourront éventuellement être avantagées par la défiscalisation. Chaque cas mérite donc d’être étudié et la décision doit être d’autant plus réfléchie que si l’on opte pour la défiscalisation, on ne peut changer d’idée par la suite. Enfin, tout en reconnaissant la valeur du modèle de fixation avec lequel elle travaille maintenant tous les jours, Me Pinard lui reproche de laisser croire à trop de simplicité. Des femmes pourraient présumer que la justice vient de mettre à leur disposition une formule mathématique et un recours sans embûches. « Lorsque les ex-conjoints s’entendent bien, ce peut être vrai. Mais dans le cas contraire, le nouveau modèle n’apaisera pas nécessairement les conflits. » Faut-il exclure pour autant la possibilité de faire réviser un jugement pour tirer avantage d’un système présenté, avant tout, comme une amélioration dans le processus judiciaire? Au contraire. Les femmes ont très certainement intérêt à s’informer de ce qui s’offre aujourd’hui à leurs enfants pour mieux répondre à leurs besoins. L’erreur serait simplement d’agir trop vite.

Pour en savoir plus long

Le ministère de la Justice et le ministère du Revenu du Québec ont publié des dépliants sur la fixation des pensions et sur la défiscalisation. On peut se les procurer gratuitement dans les bureaux de Communication-Québec, dans les palais de justice, au ministère de la Justice et dans les bureaux régionaux du ministère du Revenu.

À noter

Le a également marqué l’entrée en vigueur du système fédéral de fixation des pensions alimentaires pour enfants. Ce modèle est applicable dans les cas de divorce lorsque l’un des ex-conjoints habite à l’extérieur du Québec. Renseignements auprès du ministère de la Justice du Canada : 1 888 373-2222.