Aller directement au contenu

Quotas, quotas pas

Dans quels pays les femmes ont-elles le plus de pouvoir politique ? Si la Scandinavie en général atteint les 39 % …

Date de publication :

Auteur路e :

Dans quels pays les femmes ont-elles le plus de pouvoir politique? Si la Scandinavie en général atteint les 39 %, la Suède est en tête du peloton avec 42,7 % de femmes élues. En Finlande, premier pays à avoir donné le droit de vote et d’éligibilité aux femmes en , elles sont 37 % au Parlement, et Tarja Halonen vient d’y être élue présidente. Des exceptions, bien sûr, attribuables notamment à l’imposition de quotas. Car le magazine américain Ms a calculé le nombre de femmes dans les parlements du monde… et la moyenne frise plutôt les 13 %. D’abord, les Amériques, 14,7 % d’élues; l’Asie, 14,6 %; l’Europe, 14,2 %; puis, l’Afrique, 12 %; le Pacifique, 10,9 %; enfin, le Moyen-Orient, 5 %. Parité ne va pas de pair, pourtant, avec richesse des nations. « Quelques pays en voie de développement font beaucoup mieux que des pays industrialisés. Le Costa Rica, Trinidad et Tobago devancent l’Italie et la France, tandis que les Bahamas déclassent le Portugal », note-t-on dans le rapport annuel du Fonds des Nations Unies pour le développement. Ainsi, les États-Unis, « première démocratie au monde », ne comptent que neuf femmes sénatrices sur 100 postes et 56 femmes à la Chambre des représentants sur 435 postes. Seulement trois États sur 50 ont élu des gouverneures et 17 % des Américains ne voteraient toujours pas pour une candidate à la présidence. Le Canada, « plusse meilleur pays au monde », selon Jean Chrétien, fait un peu mieux avec 18 % de femmes aux Communes, alors que le Québec compte 19 % d’élues. Au 52e rang mondial quant à la proportion de femmes députées, la France ne surclasse en Europe que la Grèce. Ce retard un peu honteux pour le pays des « Liberté, Égalité, Fraternité (sic) » a des chances de se combler : fin , l’Assemblée nationale adoptait une loi qui forcera les partis politiques à présenter autant de femmes que d’hommes aux principales élections. La parité absolue : une mesure inédite en Europe et assez radicale dans un pays aux mœurs politiques encore machistes, où les femmes élues se font encore crier « À poil! » par des collègues et des opposants. Mais cela aussi pourrait s’atténuer : comme les ministres Martine Aubry et Dominique Voynet, les élues quitteront la salle dès qu’on y tiendra des propos sexistes. Elles sont soutenues par les Chiennes de garde, vaste coalition d’intellectuelles connues créée à l’automne pour dénoncer le sexisme sur la place publique. Le débat sur l’égalité agite en fait plusieurs pays d’Europe. La Commission européenne préparait au printemps un programme de mesures de discrimination positive en faveur des femmes. Selon le Courrier international, plus d’une vingtaine de partis européens ont déjà adopté des règles internes pour amener plus de femmes sur les listes électorales. En Allemagne, par exemple, où la question avance plus vite depuis la réunification, le parti Social-Démocrate prévoit 40 % de candidates. L’Espagne débattait fort en d’un aménagement à la loi électorale qui garantirait la parité, tandis que la Suisse rejetait une proposition plus radicale, qui aurait imposé 50 % de femmes non pas sur les listes, mais carrément au pouvoir… quitte à remplacer des hommes élus par des femmes ayant obtenu moins de voix. C’est que les quotas ont toujours leurs détracteurs : on les trouve antidémocratiques, parfois superflus, ou on juge qu’ils déprécient les femmes ainsi élues. Et puis, questionnement plus grave, à quoi sert de multiplier le nombre de députées si l’espace de la démocratie parlementaire se réduit? Dans le Courrier international toujours, un sociologue allemand faisait remarquer qu’en politique comme dans d’autres secteurs (la médecine notamment) le pouvoir s’en va quand les femmes arrivent : « L’État-nation s’efface; les femmes entrent dans les Parlements, le pouvoir émigre. » Ainsi, juste après l’élection de Tarja Halonen, la Constitution finlandaise réduisait les pouvoirs du chef de l’État… Pourtant, l’idée controversée des quotas continue de faire son chemin. Au Brésil, depuis , la « loi du rouge à lèvres » prévoit des quotas de 30 % de femmes sur les listes électorales. La députée Rita Camata propose de les hausser à 50 %. Trouvera-t-on assez de femmes intéressées? Pour l’instant, le pays compte 30 députées pour 513 circonscriptions électorales et 6 sénatrices pour 81 postes. Plus au nord, au Honduras, le Parlement votait début une loi qui accordera aux femmes 30 % des mandats électoraux. Les neuf députées, sur une possibilité de 128, avaient réussi à imposer le 50-50, mais, un jour où plusieurs d’entre elles étaient absentes, les hommes en ont profité pour abaisser le seuil à 30 % et voter la loi! Les absentes ont toujours tort. Dans d’autres sociétés, l’adoption de quotas vient saper, sans les anéantir, de fortes traditions patriarcales. En Ouganda, par exemple, les femmes ont combattu aux côtés des rebelles de la National Resistance Army, pendant les années . Après la victoire, on a reconnu leur rôle : toutes les instances électives, villageoises ou nationales, doivent avoir un minimum de femmes. Aux premières élections avec quotas, en , on en a élu 20 % au Parlement. Sept d’entre elles sont ministres, et une est vice-présidente du pays. Elles ont fait adopter un vaste plan de discrimination positive qui ouvre les écoles aux filles et protège les droits à la propriété des femmes mariées. Dans un pays où la polygamie est toujours légale, où les hommes héritent des veuves de leurs frères, où les femmes ont coutume de s’agenouiller pour servir leur mari, les quotas accélèrent radicalement le changement. Sans faire de miracles : les politiciens essaient d’abaisser l’âge du mariage pour les filles, de 18 à 14 ans… Qui dit quota, dit droit de vote. Un droit élémentaire que le Koweït refuse toujours obstinément à ses citoyennes. Seul pays arabe du golfe à disposer d’un parlement, le Koweït a connu en un débat assez féroce. D’un côté, l’émir et les députés libéraux, favorables à l’égalité des femmes; de l’autre, les islamistes sunnites opposés au droit de vote féminin, au nom d’une supériorité masculine prescrite prétendument par le Coran. Car le Coran, vite brandi par les musulmans intégristes, au Nigéria comme en Afghanistan, en Égypte comme en Algérie, a le dos large. The Globe and Mail s’interrogeait dans un éditorial à ce sujet : « Comment la doctrine égalitaire du Coran peut-elle permettre à un Égyptien de divorcer par simple serment, alors qu’une Égyptienne y mettra six ans devant la cour? Le Coran empêche-t-il vraiment les Saoudiennes de conduire des autos et de posséder des cartes d’identité? Le Coran force-t-il vraiment les Afghanes à quitter toutes les professions et positions d’autorité? Le Coran justifie-t-il qu’à peine 3 % des parlementaires arabes sont des femmes, comparativement à 13 % dans le reste du monde? » En fait, la proportion de femmes arabes en politique varie beaucoup d’un pays à l’autre, de 10,8 % en Irak et 10 % en Palestine à 2,2 % en Égypte, alors qu’elles sont totalement absentes des parlements du Qatar, d’Arabie saoudite, de Somalie et des Émirats arabes. Mais, au Koweït, les femmes n’ont pas dit leur dernier mot. La plupart sont éduquées, professionnellement influentes, beaucoup plus libérées que toutes leurs voisines. En , six activistes féministes décidaient en effet de contester devant les cours de justice la loi électorale discriminatoire qui les écarte des bureaux de vote. Histoire à suivre. Entre-temps, en Iran, une société civile, revigorée par les femmes et les jeunes, menait les réformateurs au pouvoir, aux élections législatives du . Après vingt ans de république islamique, de charia, de féodalisation des femmes, la glasnost iranienne fleurit, et l’espoir revient. Le , pour la première fois depuis , une soprano a chanté sur une grande scène de Téhéran, devant un public mixte! Spectacle interdit depuis l’ayatollah Khomeini, toujours au nom du Coran : la voix des femmes ne fait-elle pas naître des pensées impures dans l’esprit des hommes?

Deux solitudes

Mieux vaut commencer sa vie sexuelle en France, apparemment. Depuis , n’importe quelle adolescente française peut, après une relation sexuelle non protégée, obtenir gratuitement la pilule du lendemain à son école. Le NorLevo est aussi en vente, pas cher, dans les pharmacies. De plus, une grande campagne de promotion de la contraception est lancée à la télé, à la radio et dans les écoles, de façon à réduire les grossesses et les avortements chez les jeunes filles. De l’autre côté de la Manche, stratégie contraire et échec total. Les maternités précoces y sont quatre fois plus nombreuses qu’en France. On accuse l’insuffisance de l’éducation sexuelle, surtout auprès des garçons, et le tabou qui frappe encore le sexe au pays de Tony Blair.