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Crise du logement social : goulot d’étranglement

La Gazette des femmes lève le voile sur la crise du logement privé et la pénurie de logements sociaux qui règnent dans toutes les régions du Québec.

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La Gazette des femmes lève le voile sur la crise du logement privé et la pénurie de logements sociaux qui règnent dans toutes les régions du Québec. Devinez qui sont les principales victimes de ce drame immobilier au quotidien? Les femmes, toujours les femmes.

« Je suis scandalisée et frustrée, parce que les derniers budgets fédéral et provincial ne prévoient rien pour le logement social. C’est une chose de lutter contre le déficit en sabrant dans les services. Mais, maintenant qu’il y a des surplus, c’en est une autre de dire que ce sont les classes moyennes qui ont le plus souffert et que la priorité doit aller aux réductions des impôts plutôt qu’à la lutte contre la pauvreté. C’est une vision de chacun pour soi. Les personnes à faibles revenus, on s’en balance, et, ça, c’est très épeurant. »

À force de compiler des statistiques sans cesse plus noires d’une année à l’autre sur la situation du logement social au Québec, Lucie Poirier ressent une gamme de sombres sentiments. Organisatrice au Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) depuis deux ans et demi et auteure de l’étude Logement au Québec : femme et pauvreté parue en janvier 2000, elle est un témoin privilégié de la grave crise du logement privé et de la dramatique pénurie de logements sociaux qui règnent dans toutes les régions du Québec. « La situation est tellement bouchée, dit-elle, que beaucoup de gens n’inscrivent même plus leur nom sur les listes d’attente pour avoir un logement à prix modique, car ils ont le sentiment que ça ne sert à rien. »

Les statistiques leur donnent raison. Dans la seule ville de Montréal, quelque 7 000 personnes se morfondent ainsi, et les délais s’éternisent jusqu’à dix ans. À Shawinigan et à Grand-Mère, il n’y a aucune liste d’attente réservée aux familles défavorisées, tout simplement parce que les logements sociaux ne sont offerts qu’aux personnes âgées. Dans l’Outaouais, 5 000 logements de ce genre seraient nécessaires pour combler les besoins d’aujourd’hui. Il faudra un siècle pour y arriver, au rythme actuel de construction prévu de 46 par année!

À l’échelle du Québec, près de 275 000 ménages locataires prennent plus de la moitié de leur revenu pour se loger, ce qui les oblige à réduire des dépenses essentielles comme l’alimentation, les médicaments et les vêtements. Il s’agit d’une augmentation de 41 % depuis le début des années 1990. Les femmes sont les principales victimes de ce drame immobilier au quotidien. Selon les normes gouvernementales, un ménage qui alloue plus de 30 % de son revenu pour avoir un toit sur la tête nécessiterait impérieusement d’être aidé. Ce qui touche 49 % des femmes locataires qui pourvoient aux besoins du ménage, 54 % des femmes à la tête d’une famille monoparentale, 56 % des femmes de plus de 65 ans, 57 % des femmes vivant seules et 61 % des femmes de 15 à 24 ans.

Le fossé entre la demande et l’offre est abyssal. On dénombre 120 000 logements sociaux au Québec, ce qui représente à peine 10 % de l’ensemble des logements. Ce parc locatif comprend environ 80 000 habitations à loyer modique (HLM) qui appartiennent au gouvernement du Québec et que gèrent des offices municipaux d’habitation, 20 000 coopératives d’habitation que les locataires gèrent eux-mêmes et 20 000 organismes sans but lucratif d’habitation (OSBL) destinés à une clientèle peu autonome et dont la gestion est confiée à un conseil d’administration composé de représentants de différentes organisations et de locataires.

Qui ne connaît pas les HLM? En revanche, les coops et les OSBLsont méconnus, même du public cible. « Au cours d’une récente réunion à Drummondville, raconte Lucie Poirier, j’ai constaté que les femmes présentes ignoraient l’existence de ces deux autres formes de logement social, qui, le plus souvent, voient le jour grâce à l’initiative de comités de logement ou d’un CLSC. »

Quand j’ai commencé à parler d’une coopérative d’habitation ici il y a trois ans, renchérit Diane Vermette, organisatrice du comité de logement de Trois-Rivières, cela a soulevé peu d’enthousiasme. Dans les régions, les gens n’ont pas l’habitude de s’impliquer et d’appartenir à des groupes. Un travail de sensibilisation reste à faire afin qu’ils se rendent compte des avantages qu’offre cette formule, et qu’ils ne s’arrêtent pas seulement aux obligations à remplir.

Les logements sociaux sont occupés par des ménages sous la responsabilité de femmes dans 73 % des cas. « Le danger de “ghettoïsation” et de dépendance est une préoccupation réelle, convient Lucie Poirier, surtout dans les tours d’habitation érigées au début des années 1970. Depuis, on a construit de petites unités mieux adaptées à l’environnement, et de plus en plus d’associations de locataires s’efforcent de fournir des conditions de vie agréables et d’offrir une foule de services indispensables comme des cuisines collectives, des jardins communautaires, des clubs de devoirs ou des garderies. »

« La formule des HLM comporte aussi des inconvénients, estime Anne-Marie Séguin, chercheuse à l’INRS-Urbanisation, qui a fait des analyses des milieux de vie et des relations entre locataires dans ce type d’habitation. Certes, les HLM offrent en général des logements de bonne qualité et assurent une protection contre les hausses de loyer ou les expulsions. Mais là où il y a une grande concentration de HLM, des enclaves de pauvreté peuvent se constituer, ce qui risque d’entraîner une stigmatisation et une isolation sociales réelles. Par contre, la solution de rechange aux HLM, ce sont les immeubles locatifs privés, souvent mal entretenus. »

Dans le secteur privé, les femmes, les immigrantes au premier chef, n’ont parfois d’autre choix que de louer un logement présentant de sérieux problèmes de salubrité, de chauffage, d’isolation et d’insonorisation ou encore de composer avec des propriétaires négligents, voire abusifs. Pas moins de 48 % des femmes et de 60 % des assistées sociales seraient victimes de harcèlement de la part du propriétaire, selon une étude réalisée par le FRAPRU en 1986, et dont les données demeurent encore pertinentes. Et les plaintes pour condition sociale représentent 31 % des motifs de refus de logement, une réalité qui touche avant tout les femmes, puisqu’elles sont les plus pauvres de la société. En 1996, le revenu moyen des ménages locataires dont le principal soutien financier repose sur une femme s’élevait à 23 385 $ comparativement à 30 950 $ du côté des hommes. Pire encore, de 1991 à 1996, le revenu de ces femmes n’a augmenté que de 1,5 %, alors que la hausse des loyers, y compris le chauffage, était de 5,4 %.

Malgré la pauvreté croissante et l’aggravation de la pénurie du logement social, le gouvernement fédéral s’est désengagé de ce secteur en 1994 et en a cédé, en pratique, l’entière responsabilité aux provinces. Un retrait qui a coûté quelque 30 000 logements sociaux au Québec, selon le FRAPRU. Ottawa se contente désormais de financer l’entretien des logements sociaux construits avant 1994, ce qui représente 1,9 milliard  $ ou 1 % du budget.

La situation n’est guère plus reluisante au provincial. Dans le cadre du programme AccèsLogis, Québec finance depuis 1997 la mise en place de 1 325 logements de type coopératif ou à but non lucratif par an. Soit six fois moins que dans les années 1980. « Non seulement très insuffisant, ce programme favorise de plus la construction de coopératives ou d’OSBLplutôt que de HLM, car Québec ne veut plus gérer des logements sociaux », estime Lucie Poirier.

« À vrai dire, les 1 325 logements sociaux annuels prévus par le programme AccèsLogis ne sont pas tous en place, affirme Diane Vermette. À titre d’exemple, ça fait trois ans que j’essaie de créer une coopérative d’habitation à Trois-Rivières. L’hiver dernier, j’ai même trouvé l’endroit idéal, une école abandonnée, mais en bon état, dans laquelle on pourrait aménager douze logements. On parle d’un projet d’environ 700 000 $. Mais, compte tenu des loyers que peuvent payer les gens, il aurait fallu que j’obtienne une aide financière d’environ 250 000 $ de la Ville. »

Selon les critères d’admissibilité à AccèsLogis, les municipalités doivent en effet contribuer au coût d’un projet de logement social dans une proportion de 5 % à 15 %. « Le problème est que bon nombre de municipalités refusent, dit Lucie Poirier. Comme Sainte-Foy, pour conserver son image, ou comme Saint-Jérome qui prétend qu’il n’y a pas de pauvreté chez eux. » Lucie Poirier sort ses chiffres : près de 60 % des ménages locataires de cette municipalité du nord de Montréal, dont le principal soutien financier est assuré par une femme, consacraient plus de 30 % de leur revenu au logement en 1995.

Le FRAPRU estime que Québec devrait obliger les municipalités à soutenir financièrement la construction de logements sociaux. Tout ce qui est prévu dans le livre blanc de la ministre Louise Harel sur la réforme des municipalités, c’est la répartition des coûts entre les différentes municipalités d’une MRC, mais seulement pour les logements sociaux existants. Une bonne nouvelle, tout de même, pour les villes de Montréal et de Québec qui abritent environ le tiers des HLM de la province, même si elles ne comptent que le sixième de la population. Ainsi, l’effort financier consenti par Montréal dans l’offre de logements publics est quatre fois plus élevé que celui des banlieues de la région métropolitaine.

Envisagée durant un temps par le gouvernement québécois, la décentralisation du logement social vers les municipalités semble être renvoyée aux calendes grecques. « Une telle décentralisation aurait rendu incertain l’avenir des HLM existants, juge Anne-Marie Séguin. Une municipalité plongée dans une mauvaise situation financière aurait pu penser, par exemple, à vendre une partie ou la totalité de son parc de logements sociaux. Surtout qu’il va falloir investir bientôt dans la remise en état de certaines unités et dans la gestion de milieux qui se sont complexifiés et diversifiés socialement au fil des années. »

Et les promesses électorales de la campagne de 1998 du gouvernement Bouchard qui permettaient d’entrevoir des jours meilleurs? Elles demeurent… des promesses. Rien de concret pour l’instant. Le nombre de logements construits sous l’impulsion du programme AccèsLogis devait augmenter de 100 par année. La subvention permettant aux locataires défavorisés de ne consacrer que 25 % de leur revenu au logement — comme dans les HLM — devait être renouvelée pour une autre période de cinq ans. Le programme de supplément au logement privé devait s’enrichir de 3 000 nouvelles personnes admissibles.

« On attend toujours que le gouvernement Bouchard respecte ces engagements électoraux », lance Lucie Poirier qui s’inquiète, par ailleurs, de la tendance de celui-ci à favoriser le logement privé plutôt que social. « Au lieu de construire de nouveaux logements sociaux dont la collectivité serait propriétaire, on préfère donner un supplément à des locataires en attente d’un HLM. Cette formule moins coûteuse s’apparente en fait à une subvention aux propriétaires qui n’ont pas réussi à louer leurs logements de mauvaise qualité. »

« Dans les grands centres, ajoute Anne-Marie Séguin, le marché locatif tend vers un taux d’inoccupation plus faible, ce qui signifie un moins grand choix de logements et des loyers plus élevés. Dans ce contexte, une allocation au logement risquerait de servir davantage à éponger les hausses de loyer qu’à améliorer les logements. »

Non seulement Québec n’investit pas davantage dans le logement social, mais il a réduit son effort financier dans son dernier budget. « Cinquante millions de dollars prévus en 1999 pour l’habitation n’ont pas été dépensés, notamment parce qu’on n’a pas bien fait connaître le programme d’allocation de logement qui fournit une aide mensuelle allant jusqu’à 80 $. Aussi, bien des locataires ne savaient même pas qu’ils y étaient admissibles, explique Lucie Poirier. Le gouvernement a remis cette somme dans le Fonds consolidé de la province et a réduit d’autant le budget alloué à la Société d’habitation du Québec (SHQ). » Pourtant, près de 200 000 ménages défavorisés ne reçoivent aucune aide pour se loger, selon des données de la SHQ.

Que faire, sinon revendiquer encore plus fort et en plus grand nombre? C’est bien ce que comptent accomplir les participantes à la Marche mondiale des femmes, en octobre prochain à New York. Les porte-parole de la soixantaine de comités de logement du Québec vont y réitérer leurs demandes : mettre en branle de grands travaux de construction de 8 000 nouveaux logements sociaux par année au Québec et exiger qu’Ottawa respecte son engagement de doubler son appui financier à l’habitation, soit de 1 % à 2 %.

« Les gouvernements gardent des as dans leurs manches qu’ils vont dévoiler à l’occasion de cet événement médiatique », espère Diane Vermette. Elle rajoute aussitôt : « Il faut se rabattre là-dessus, puisqu’il n’y a rien dans les derniers budgets. »

Et personne n’ose imaginer une autre fin de non-recevoir des élus.

Sonnette d’alarme

Une proportion croissante de jeunes, dont de jeunes femmes, n’a carrément plus les moyens de se loger. Une situation qui ne cesse de se détériorer depuis vingt ans. C’est ce qui se dégage d’une récente étude commandée par la Société d’habitation du Québec à l’INRS-Culture et Société*.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes.

  • La proportion des jeunes ménages qui consacrent 30 % ou plus de leur revenu pour se loger monte en flèche (40 % chez les moins de 30 ans en 1996 comparativement à 25 % en 1981). Chez les 15-24 ans et les 25-29 ans respectivement, elle est de 55 % et de 32 %. Cette dure réalité touche 80 % des chefs de familles monoparentales de 15 à 24 ans. Des femmes dans une forte proportion.
  • Les jeunes sont plus nombreux à vivre chez leurs parents maintenant qu’au cours des quinze dernières années. Une tendance particulièrement évidente dans le groupe des 20-24 ans : 54,9 % en 1996 contre 47 % en 1981. Un phénomène qui touche davantage les jeunes femmes puisqu’on constate une augmentation de 37,1 % à 46,3 % pour la même période, bien qu’elles soient au total moins nombreuses que les gars (57 % à 63,4 % de 1981 à 1996) à demeurer au foyer familial.
  • Les couples de moins de 30 ans à faible revenu sont aussi de plus en plus nombreux (40 %). Ce taux dépasse les 70 % (!) chez les 15-24 ans qui vivent à Montréal et à Québec. Or, dans ce cas, les ménages sont soutenus majoritairement par des femmes.
  • Les jeunes ménages sont moins souvent propriétaires en 1996 qu’en 1991, la proportion étant passée de 39,9 % à 42,3 %.

En désespoir de Cause

Elles ont retroussé leurs manches pour se trouver un toit convenable. Et ça marche! De démunies, elles sont devenues autonomes. Attendre quatre ans pour accéder à un logement social, c’est tout un bail! Surtout quand il ne vous reste que 43 % de votre revenu une fois payé le loyer. « Ça finit par jouer sur la santé et ça crée de l’anxiété », dit Suzanne Blanchette, porte-parole d’un groupe d’une douzaine de femmes qui, en désespoir de cause, se sont regroupées au début de l’année pour former une coopérative d’habitation à Rimouski. L’une d’elles engloutissait 82 % de son revenu pour se loger, une autre était inscrite sur la liste d’attente pour avoir un logement à prix modique… depuis sept ans. « Les femmes se découragent. Celles qui ont des enfants ou qui vivent de la violence ont bien sûr priorité sur les autres. Mais, pour des femmes seules comme moi, les logements les plus en demande, des trois-pièces et demie, sont aussi ceux pour lesquels l’attente est la plus longue », poursuit Mme Blanchet, une femme de 47 ans en situation financière précaire parce qu’elle est retournée aux études.

Une lettre du comité de logement Rimouski-Neigette la conviant à une réunion en février dernier a redonné espoir à Suzanne Blanchette. « Je cherchais des solutions pour améliorer mon sort, dit-elle. J’y suis allée par curiosité et j’ai entendu parler de coopérative d’habitation pour la première fois de ma vie. »

Et voilà cette femme, jusque-là isolée, propulsée porte-parole du premier projet de coopérative d’habitation à voir le jour depuis les années 1980 à Rimouski. Conseillées par le comité de logement et encadrées par un groupe de ressources techniques, ces femmes se sont familiarisées avec les méandres juridiques, financières et bureaucratiques de la création d’une coopérative d’habitation. À l’issue d’une rencontre fructueuse avec le maire à la mi-mars, elles se sont mises, avec une énergie peu commune, à la recherche de trois immeubles de quatre logements chacun nécessitant peu de rénovations.

La Coopérative d’habitation L’Eider doit devenir réalité à l’hiver prochain. « On a hâte, témoigne Suzanne Blanchette. Toutes veulent améliorer leurs conditions de vie, avoir une plus grande autonomie et pouvoir se nourrir convenablement. Et on va s’entraider. Déjà, malgré tous les problèmes à régler, on fraternise et on rit. » Le projet a nécessité un investissement d’environ 750 000 $. Entre 45 % et 55 % du projet sera financé par la Société d’habitation du Québec dans le cadre du programme AccèsLogis et entre 5 % et 15 %, par la municipalité. Les locataires paieront le reste sous forme d’une hypothèque collective.

Cette initiative est d’ores et déjà contagieuse. Le comité de logement Rimouski-Neigette est en train de former au moins un autre groupe de femmes démunies pour démarrer d’autres coopératives d’habitation à compter de septembre 2000. « Le premier projet était un test en vue de vérifier l’intérêt des élus, car beaucoup de municipalités refusent de contribuer au développement du logement social, affirme Christine Pelletier, coordonnatrice du comité de logement Rimouski-Neigette. Tant que le programme AccèsLogis va exister et tant que la ville va vouloir y prendre part, nous allons en créer d’autres, car les besoins sont énormes à Rimouski. »

Dans cette ville, environ 1 650 ménages consacrent en effet plus de 30 % de leur revenu au logement. Et, dans 49 % des cas, ils ont comme principal soutien financier une femme. Or, il se construit à peine une trentaine de logements sociaux par année dans toute la région du Bas-Saint-Laurent.

Il y a trois ans, Isabel Nadon a déménagé à un coin de rue d’où elle habitait. Petit déplacement géographique, mais changement majeur dans sa vie. De locataire consacrant près de 60 % de son maigre revenu au loyer, cette mère de deux enfants est devenue présidente d’Habitation Philomène, un organisme sans but lucratif d’habitation (OSBL) destiné avant tout aux familles monoparentales de Mercier, dans le sud-ouest de Montréal. Aujourd’hui, il lui reste 75 % de son revenu, une fois son loyer payé. Et elle vit dans un environnement social plus stimulant qu’avant.

« Je m’ennuyais un peu, je me sentais inutile, dit cette femme de 25 ans qui a décidé de demeurer à la maison afin d’élever ses enfants jusqu’à ce qu’ils aillent à l’école. Alors, je me suis impliquée dans l’entretien de l’immeuble, puis intéressée à la gestion de l’OSBL. Et j’apprends plein de nouvelles choses. »

L’Habitation Philomène a été fondée en avril 1997 par trois femmes démunies, à l’initiative du CSLC de Châteauguay. Les fondatrices ont elles-mêmes déterminé les critères de leur future habitation, deux unités de six logements de deux étages qu’elles voulaient situées loin de la grande route. Elles ont conçu les plans qui comptent, entre autres, une salle communautaire dans laquelle est aménagée une cuisine collective. Et elles ont participé à la sélection des locataires. La première fut Isabel Nadon. Outre le coût abordable du loyer, elle vit dans un cadre qui répond parfaitement à ses besoins. Et elle jouit d’un climat social qui se caractérise par une grande entraide de la part des douze locataires et par des chicanes occasionnelles entre la quinzaine d’enfants. « On s’échange souvent des choses et on se donne un coup de main, particulièrement pour le gardiennage. Par contre, il y a beaucoup de cris d’enfants à l’extérieur l’été. Au point qu’on a dû suivre un cours de résolution de conflits. » La présidence accapare beaucoup Isabel Nadon. « Avec douze locataires, c’est bien du travail, surtout que j’ai de la difficulté à déléguer des tâches », avoue-t-elle. Et elle participe à l’élaboration de la deuxième phase d’Habitation Philomène, un projet de deux unités de neuf logements chacun qui devrait être achevé d’ici le 15 juillet 2000. « Cette nouvelle réalisation m’emballe beaucoup », conclut la jeune femme qui aspire un jour à terminer ses études et à acquérir sa propre maison.