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Kaléidoscope

Dresser un bilan de la première décennie du 21e siècle serait prématuré, mais essayer de la circonscrire, de faire le point peut guider notre réflexion pour l’avenir.

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Dresser un bilan de la première décennie du 21e siècle serait prématuré, mais essayer de la circonscrire, de faire le point peut guider notre réflexion pour l’avenir. C’est dans cette optique que le journaliste Nicolas Langelier a invité de remarquables membres de la relève culturelle et intellectuelle québécoise à lui faire part de leur vision de la première décennie des années 2000.

Rafaële Germain, Hugo Latulippe, Fanny Britt, Séripop et Karina Goma, notamment, ont accepté l’invitation de Nicolas Langelier. De plus, en leur demandant de se prononcer sur l’avenir du livre, sur ses manières de survivre à l’art numérique et de se démarquer d’un contenu Web, et parce qu’au-delà du propos, produire un livre agréable à regarder faisait partie intégrante de sa démarche, Nicolas Langelier leur a donné carte blanche sur le ton et la forme. « Il y a des textes de fiction, d’analyse, des illustrations, des photos… Ça va dans toutes les directions, mais l’accumulation des différents points de vue finit par tracer un portrait assez complet de notre époque. »

Pourquoi avoir approché ces « leaders créatifs » en particulier ?

Malgré leur jeune âge, la plupart de ces leaders ont fait leurs preuves, et cela ne saurait tarder pour les autres. Je pense que ces membres de la relève vont devenir des figures importantes de la société québécoise, des références. J’aime et je respecte leur travail, leur jugement. Il fallait que ces personnes aient une vision de notre décennie et que celle-ci se soit traduite dans leur production. C’était le critère. Je cherchais des gens qui pourraient nous aider à trouver un sens à ce que nous vivons et qui, quand nous avons encore les deux pieds dedans, nous semble parfois très confus.

Pourquoi avoir uniquement réuni des gens de moins de 40 ans ?

J’ai beaucoup de tendresse et d’admiration pour ma génération dans la mesure où je trouve que, socialement, économiquement et simplement pour ce qui est de l’air du temps, nous n’avons pas eu la vie facile. Nous n’avons pas eu de grand événement rassembleur, notre Mai 68 ou notre projet de pays, quelque chose qui aurait pu nous mobiliser et peut-être nous orienter vers une certaine direction. Dans la société actuelle, beaucoup de forces sont plutôt de nature à diviser les gens. L’individualisme est de plus en plus marqué, et les communautés sont toujours plus petites. Je voulais donc prendre leur pouls en tant que génération, savoir comment ces leaders créatifs ont perçu cette décennie et s’en sortent au crépuscule de celle-ci, avec les nuages environnementaux, sociaux, politiques et économiques qui s’accumulent sur nos têtes.

Qu’est-ce qui vous a le plus étonné dans leurs témoignages ?

J’ai été surpris du pessimisme qui se dégage de plusieurs contributions. Sauf que lorsque je regarde autour de moi — et c’est quelque chose qui est aussi très présent dans le livre –, je sens un besoin de retour vers un esprit de communauté, vers la solidarité. Ce changement de valeurs chez ceux et celles qui se rendent compte que la modernité nous a menés dans une espèce de cul-de-sac me permet de garder espoir pour l’avenir, de voir sur quoi travailler pour être plus heureux.

Extrait

« Sans doute les historiens du futur arriveront-ils à trouver un sens à tout cela, à cette décennie non conformiste mais conventionnelle, individualiste mais ultra-connectée, hypertechnologique mais attachée à une certaine image idyllique du passé, conscientisée mais inconsciente, hédoniste mais obsédée par la santé, militante mais si fréquemment apathique. […] Il n’est donc pas surprenant qu’une foule de questions nous submergent. Qu’est-ce qui définit notre époque ? Qu’est-ce qui nous définit, nous, qui l’avons vécue, subie, inventée ? Où en sont nos projets, nos rapports humains, nos rêves? »

Nicolas Langelier