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L’égalité vue par Gabriel Nadeau-Dubois

Tant que des femmes, en tant que groupe, sont en situation d’insécurité ou d’infériorité, la bataille pour l’égalité n’est pas terminée.

Date de publication :

Militant, auteur et chroniqueur, Gabriel Nadeau-Dubois s’est fait connaître comme leader étudiant lors de la grève étudiante de 2012, alors qu’il s’opposait énergiquement à la hausse des droits de scolarité. On peut lire son essai sur le sujet, Tenir tête, paru en 2013 chez Lux Éditeur, et écouter tous les lundis sa chronique société à l’émission Gravel le matin, sur les ondes d’Ici Radio-Canada Première. Indigné par les injustices sociales et ardent défenseur de la cause environnementale, c’est ici sur l’égalité femmes-hommes qu’il se prononce.

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Dans l’actualité, qu’est-ce qui vous fait le plus grincer des dents ces temps-ci en matière d’inégalité femmes-hommes?

Les politiques d’austérité du gouvernement Couillard, sans aucun doute. On a beaucoup parlé de violence sexuelle et de harcèlement dans les derniers mois, et c’est une excellente chose. Je crois que sur ce plan, les esprits sont de plus en plus sensibilisés, même s’il reste évidemment beaucoup de chemin à faire. Actuellement, ce qui passe sous silence, ce sont les effets dévastateurs des politiques libérales. Quand on sait que 75 % des employés du secteur public sont des femmes, que celles-ci utilisent davantage ces mêmes services publics que les hommes, on est forcé de conclure qu’austérité et égalité des sexes ne peuvent pas aller de pair. À quoi servent les beaux discours sur la parité et l’égalité juridique si, dans les faits et au quotidien, les femmes les plus vulnérables sont abandonnées par les institutions censées leur venir en aide?

À quel film ou à quelle série décerneriez-vous un prix Déméritas du sexisme?

Je ne vais pas me faire d’amis avec cette réponse, mais j’ai récemment revu un épisode de Un gars, une fille et j’ai ressenti un profond malaise. Je suis convaincu que ses auteurs et ses artisans ne sont ni misogynes ni sexistes, mais il faut reconnaître que cette série misait essentiellement sur la reprise de conceptions ultratraditionnelles des genres. Je ne dis évidemment pas qu’elle mettait en scène des situations de domination masculine, mais plutôt qu’elle reprenait de manière acritique — et en les confirmant — des stéréotypes genrés qu’il faudrait plutôt repenser. La quasi-totalité des blagues était de ce type. Je crois cependant que depuis ces années-là, la société québécoise a évolué et que si la série était lancée en 2015, elle ferait réagir davantage. C’est peut-être une preuve que, malgré tout, nous avançons tranquillement sur le chemin de l’égalité.

Un métier non traditionnellement associé aux hommes qui vous fait rêver en tant qu’homme? Pourquoi?

Cela fait longtemps que l’enseignement m’intéresse. J’ai longtemps travaillé avec des enfants et j’ai eu quelques expériences d’enseignement récemment qui ont confirmé que cette passion était encore bien en vie chez moi. L’enseignement et la prise en charge des enfants sont des tâches traditionnellement féminines, mais elles m’interpellent profondément : prendre soin, transmettre, élever… c’est aussi la raison pour laquelle je sais que je veux une famille nombreuse!

Répartition des tâches à la maison : vous êtes plutôt salade traditionnelle ou crémeuse? Allons! Soyons francs!

Crémeuse, sans hésiter, si cela signifie que la répartition des tâches à la maison est tout sauf traditionnelle! J’ai eu la chance de grandir dans une famille où les hommes participaient activement et de manière égalitaire aux différentes tâches domestiques, notamment en se chargeant d’une bonne partie de la préparation des repas. Ce sont des hommes qui m’ont appris à cuisiner et aujourd’hui, cela paraît dans ma propre maison : je cuisine tous les repas, en plus de contribuer à plusieurs autres tâches. Ma copine et moi sommes très fiers de la manière dont nous fonctionnons au quotidien.

L’égalité entre les femmes et les hommes sera atteinte quand…

Quand elle sera non seulement juridique, mais réelle sur les plans sexuel, économique, social et politique. Tant que des femmes, en tant que groupe, sont en situation d’insécurité, d’infériorité ou de vulnérabilité, nous n’avons pas le droit de dire que la bataille pour l’égalité est terminée. Sauf qu’en tant qu’homme, ce n’est pas mon rôle d’indiquer la marche à suivre pour atteindre cet objectif.