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Le goût du risque – Andrée-Lise Méthot

Fondatrice et associée principale de cycle capital management, le premier fonds Québécois de capital-risque consacrée aux technologies propre.

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J’ai suivi un parcours plutôt militant sur les plans féministe et environnemental, raconte Andrée-Lise Méthot. Née en 1967, je suis arrivée sur le marché du travail dans une réalité très difficile, à la fois pour ma génération et pour les femmes. Surtout dans les métiers liés à la science. J’ai donc dû innover. Fondatrice et associée principale de cycle capital management, le premier fonds québécois de capital-risque consacré aux technologies propres.

Formée en science et intéressée par l’économie, Andrée-Lise Méthot a su très tôt que pour modifier les choses en profondeur, il fallait utiliser les leviers économiques. Ce qu’elle a fait, en 2003. « Je me suis occupée d’un fonds de 18 millions de dollars investis dans les technologies propres. Mais ce fonds n’était pas destiné à donner un rendement solide. Il fallait le mettre à niveau et… je devais prendre un risque personnellement. J’ai donc créé une entreprise, trouvé un partenaire, et c’est en partie notre
propre argent que nous investissons dans les compagnies, en majorité québécoises, qui fonctionnent avec des technologies vertes. Nous gérons l’argent qui nous est confié par nos investisseurs (Brookfield, Fonds de solidarité FTQ, Caisse de dépôt et placement, etc.). »
Une voie d’avenir, puisque les investissements mondiaux en technologies propres sont passés, en sept ans, de 200 millions à plus de 8 milliards de dollars!

« Il y a très peu de femmes en capital de risque,mais elles sont plus nombreuses dans les technologies propres, explique la spécialiste.C’est sans doute parce que nous sommes intéressées par la santé en général, plus que par l’environnement comme tel. » Elle pense en outre que les secteurs précurseurs (pas seulement économiques) sont ceux où les femmes sont les plus nombreuses. «On accepte d’aller dans des zones moins structurées,moins organisées et définies. Le désir du risque des femmes
m’impressionne. »

Toutefois, ce sont des hommes qui ont donné le coup de pouce nécessaire à cette femme volontaire. « J’ai croisé sur ma route des femmes remarquables, notamment Louise Vandelac, qui m’a inspirée [NDLR: la sociologue Louise Vandelac anime aujourd’hui le Centre de recherche interdisciplinaire sur la biologie, la santé, la société et l’environnement], mais aussi des hommes exceptionnels. La plupart d’entre eux m’ont offert un soutien remarquable et ont reconnu un potentiel chez moi. »

Mme Méthot dit savoir où réside sa force : « Faire adhérer des gens de qualité à mes valeurs. Est-ce que c’est féminin? Je ne sais pas…» En tout cas, la capacité de susciter l’adhésion, de convaincre est une caractéristique mentionnée dans de nombreuses études sur le leadership féminin. Elle connaît aussi ses faiblesses : « Je sais que je ne sais pas tout, et j’accepte facilement de m’entourer de gens meilleurs que moi dans certains domaines. »

Son principal moteur :mener sa vision à bon port. « Pour avoir du succès, certes, mais surtout pour participer à transformer l’économie québécoise, qui est en plein bouleversement. Je suis l’héritière de la Révolution tranquille, du combat des femmes et des francophones, de la prise de contrôle de nos outils de développement collectifs.Mais je suis en total désaccord avec les paradigmes économiques qui nous ont menés dans des crises successives, et je déplore le fait qu’on ait hypothéqué nos
ressources naturelles, contaminé la nature. »

Pas le choix, donc, de s’impliquer. La route fut houleuse, mais motivante. Et Andrée-Lise Méthot en a profité pour apprendre des hommes. « Par exemple, quand je cherchais des partenaires (ce ne sont que des hommes qui se sont présentés), les entrevues commençaient toujours par la négociation : ils voulaient connaître leurs conditions dès le départ. Personnellement, je ne m’étais jamais demandé quelles seraient mes conditions financières; je voulais d’abord et avant tout mener mon projet à terme! Pourtant, je crois qu’ils avaient raison. C’est une belle leçon : il faut savoir apprendre de nos différences. »